lundi 25 mars 2013

Crise : La science espagnole croule sous les cadavres


En temps de crise, même mourir revient trop cher...


Donner son corps à la science après sa mort a longtemps été un tabou en Espagne, où la tradition chrétienne est encore très forte. Mais la crise économique qui sévit depuis 2008 a fait évoluer les mentalités. Motivés par des raisons essentiellement financières, de plus en plus d'Espagnols ont en effet recours aux facultés de médecine pour éviter le coût des obsèques.



Le prix d'un enterrement reste très élevé dans un pays où près de 25 % de la population active est au chômage. On estime entre 3 000 et 8 000 euros en moyenne le prix d'un enterrement classique alors que le salaire moyen atteint tout juste les 1 000 euros. Nombreuses sont les familles à vouloir éviter une telle dépense à leurs enfants ou proches. Il s'agit surtout de personnes âgées, qui expliquent sans hésiter qu'elles ne veulent pas devenir une charge pour leur famille à leur mort. Ainsi, selon l'université de Barcelone, les demandes des donateurs de leurs vivants se sont multipliées ces deux dernières années. On est passé de 300 à plus de 600 demandes annuelles.

Chaque faculté gère le service à sa manière et applique ses propres critères. Pour certains établissements, il suffit que le donateur remplisse la documentation et l'envoie par courrier. D'autres acceptent les corps des défunts même si ces derniers n'ont pas expressément donné leur consentement de leur vivant. Dans ce cas, il suffit que les membres de la famille transmettent le supposé désir du défunt à sa mort.
Prise en charge

"Cette pratique pourrait faire passer les intérêts économiques avant l'altruisme d'un acte qui doit s'exprimer de façon consciente, libre et volontaire du vivant de la personne", met en garde José Luis Bono, président de la Société anatomique espagnole. Le motif économique est certes alléchant. Lorsqu'on lègue son corps à la science, les universités assument toutes les dépenses. Elles prennent en charge le transport, la préparation (embaumement ou congélation) et, après utilisation (jusqu'à cinq ans plus tard), l'incinération du corps.

En outre, cela permet également de récupérer les frais des assurances, contractées pour les frais de décès. Il n'est donc pas étonnant que les services des morgue des facultés de sciences soient submergées. À l'université scientifique de la Complutense de Madrid, le don de corps a augmenté de 40 % en deux ans et l'on y approche de la saturation. "Auparavant, nous ne pouvions presque pas faire de travaux pratiques. Aujourd'hui, nous avons accru l'utilisation de matériel cadavérique", explique María López, du service technique des dons de corps. Les étudiants disposent désormais d'un cadavre à disséquer par personne. "Pour apprendre, rien ne vaut un cadavre", se réjouit José Luis Bono.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire